Ancrer les Ehpad dans des stratégies de différenciation

Pour améliorer l’accompagnement de leurs résidents comme de leurs équipes, les directeurs peuvent choisir de se différencier par la qualité ou par l’innovation.
Dans son établissement, la résidence Le Grand Pré à Alboussière (07), Sylvain Guillaume a choisi la méthode proposée dans le projet Agile.
Explications.

Cette méthode très souple s’adapte aux besoins du résident qui peuvent évoluer tout au long du projet. La première étape consiste à décomposer le projet global visant l’innovation et la qualité en plusieurs actions, chacune résultant d’un travail de recherche mené conjointement par le personnel et l’équipe de direction. Il permet d’identifier des actions pour améliorer la prise en charge et l’accompagnement, tout en permettant à l’établissement d’innover. Une responsabilisation des équipes, comme l’acceptation des erreurs ou échecs éventuels, est à ce stade nécessaire.

Pour avancer efficacement, les équipes doivent s’emparer du projet et accepter qu’il soit revisité ou revu au cours des diverses étapes pour continuer de l’améliorer. La direction se charge quant à elle de rechercher les fonds nécessaires en sollicitant les financements de l’agence régionale de santé, la conférence des financeurs du département ou des fondations si le statut juridique le permet. La mise en place de stratégies de différenciation par la qualité et l’innovation a un effet indéniable sur l’implication, la motivation et la satisfaction du personnel. Cela facilite également les recrutements et la fidélisation des professionnels.

La gouvernance doit être également revisitée avec une délégation large pour le directeur et les membres de l’équipe de direction et favorisant l’autonomie.

Exemple d’actions mises en place ou en cours de déploiement.

Les actions menées dans le cadre d’une stratégie de différenciation par la qualité

Objectif : répondre au besoin de reconnaissance des compétences. Des actions permettent de favoriser le partage des différentes approches et des connaissances de façon pluridisciplinaire via des comités éthiques interétablissement. Il s’agit de reconnaître une autonomie professionnelle du personnel sur leur champ spécifique en adoptant un management situationnel tenant compte de l’autonomie de chaque collaborateur; développer et valoriser les postes de référent en développant l’expertise (référents douleurs, bientraitance, hygiène, éthique, bucco-dentaire); reconnaître le besoin d’équilibrer vie personnelle et vie professionnelle via des plannings adaptés.

Objectif : regarder le travail autrement via la mise en place des « référents résidents ». Le référent favorise la prise de repères pendant les premières semaines dans l’établissement. Il doit être l’interlocuteur direct pour les besoins quotidiens du résident. Il assure l’interface entre l’établissement et la famille ou le tuteur, recueille et centralise les besoins, souhaits et habitudes de vie, favorise la dimension relationnelle et donc une individualisation de l’accompagnement.

Objectif : Favoriser l’expertise d’accueil via l’évaluation des «besoins» à domicile pour rencontrer les futurs résidents. Ce dispositif innovant permet de rendre l’entrée en établissement moins brutale pour le futur résident: une équipe de l’Ehpad (infirmier coordinateur, aide-soignant, chargé d’accueil) va systématiquement à la rencontre de la personne qui demande à entrer au sein de l’établissement ou demande des renseignements, répond à ses interrogations et détaille la prise en charge proposée au sein de l’établissement.

Objectif : réduire les troubles musculosquelettiques, via par exemple l’achat d’exosquelettes.

Les actions menées dans le cadre d’une stratégie de différenciation par l’innovation.

Les astreintes infirmières : l’astreinte est une période durant laquelle l’agent n’est pas à la disposition permanente et immédiate de son administration, mais disponible, il doit pouvoir intervenir rapidement. Pour le ministère de la Santé, le dispositif permet d’améliorer la pertinence des hospitalisations non programmées la nuit, la qualité et la sécurité de la prise en charge. Les astreintes sécurisent également l’équipe de nuit.

Le développement des activités physiques adaptées et de l’escrime : il agit sur la diminution de la consommation de médicaments, la réduction des chutes, le bien-être des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, le sommeil, les capacités fonctionnelles.

Le déploiement d’actions de soutien aux proches aidants : l’objectif principal est d’offrir une palette de services tant au profit des aidants (par l’information, la formation et l’offre de répit) que des professionnels ( dans la prise en charge de l’aidant). tHAS préconise de développer ce type d’actions.

L’achat de la table magique Tovertafel. Les études d’impact montrent une amélioration de l’activité physique, de l’interaction sociale et de la qualité de vie chez les personnes atteintes de démence moyenne à sévère.
Un travail autour de plaids connectés (couvertures sensorielles, démarche Maase) et de chariots Snoezelen pour une prise en charge non médicamenteuse : ces deux outils permettent de prévenir et favoriser l’atténuation de l’anxiété avec ou sans symptômes comportementaux du résident.

La médiation animale est une méthode alternative douce non médicamenteuse. La relation à l’animal ouvre les champs de communication (verbale, non verbale, sensitive), sans prérequis physiques (possible pour tout usager à mobilité réduite). Les troubles cognitifs modérés voire sévères ne sont en aucun cas une contre-indication, la médiation animale pouvant au contraire les canaliser voire les apaiser par le toucher, le contact et le lien non verbal. La relation à l’animal, espace de projection des rapports humains, permet de mettre en travail l’estime de soi et la gestion des émotions.

La mise en place de projets autour de la réalité virtuelle (Lumeen) permet d’améliorer la qualité de vie et le bien-être des bénéficiaires en proposant des expériences immersives qui les font voyager (sites culturels, nature, immersion avec les dauphins, aurores boréales, etc.) et de favoriser les échanges autour de ces expériences pour créer du lien social.

La borne musicale Mélo répond à trois objectifs principaux: la musique plaisir pour permettre à tous les résidents de partager et d’accéder facilement, non pas à la musique, mais aux musiques qui leur donnent du plaisir; la musique stimulation pour proposer une gamme d’activités et de loisirs pour stimuler la personne; la musique à visée thérapeutique pour proposer des solutions qui .permettent de dynamiser ou d’apaiser chaque résident de l’établissement, qu’il soit autonome, désorienté ou apathique. »

Sylvain Guillaume / Juliette Viatte
Géroscopie pour les décideurs en gérontologie I N° 142 I septembre 2022

error: Contenu protégé ! Vous ne pouvez pas copier ce contenu.